Merci à vous et à votre fidélité (de toute façon, je note les absents).
Voici la sixième et, a priori, dernière épître de mes miscellanées.
Cette fois-ci, nous allons aborder le fantastique dans le steampunk… ou l’inverse.
En effet, le style, bien que jeune et en vogue, a su rapidement se diversifier soit vers d’autres styles légèrement différents, comme le dieselpunk par exemple, soit se compléter ou s’élargir en incorporant d’autres genres, ou éléments de genres (magie, créatures fantastiques, thèmes de science-fiction…). Ce sont ces derniers que je vous propose d’aborder ici. La liste n’est, comme à mon habitude, pas exhaustive, mais je tenterai d’aborder quelques-uns des thèmes majeurs et / ou qui me paraissent essentiels.
Les prérequis du fantastique
Les éléments de styles ou de genres qui sont ajoutés à un degré plus ou moins prononcé sont divers et variés. Bien que l’on puisse chipoter sur la notion de “fantastique”, ce sera le qualificatif que je leur appliquerai.
Notez bien que le Steampunk lui-même appartient au fantastique, ou pour paraphraser Jules Vernes, à l’extraordinaire (à notre époque, car de son point de vue il s’agissait de S.F. … Vous suivez toujours ?… Bien !).
On pourra, dès lors, trouver deux cas de figure :
Soit des éléments steampunk sont intégrés à un univers fantastique préexistant. La vision des Nains dans l’univers du jeu Warhammer Age of Sigmar - appelés Kharadron - et à leurs équipements caractéristiques font pourtant partie d’un univers médiéval fantastique. Excellente illustration s’il en est (sans flagornerie aucune).
Soit des éléments fantastiques sont intégrés à un univers steampunk préexistant. C’est sur ce dernier cas que nous allons nous pencher.
Les éléments anachroniques dans le steampunk
Prenons l’exemple du film “l’île sur le toit du monde” (1974) - déjà cité pour son superbe ballon dirigeable - où les héros, partis en expédition en l’an de grâce 1907, vont croiser la route d’une peuplade viking.
Ou encore “Voyage au centre de la Terre” de Vernes, dans lequel les héros vont croiser des… dinosaures !
On notera, dans ce cas précis, que l’auteur a su “surfer” sur les disciplines en vogue à l’époque (1864) qu’étaient la géologie (aventure souterraine) et la paléontologie (d’où les dinosaures et non nous n’avons pas attendu Hollywood, 1993 et “Jurassic Park” pour que ces touchantes et dévorantes créatures soient à la mode, non mais !). Cela pimente grandement le quotidien des héros (du moins pour ceux qui survivent) et ajoute un sel bienvenu pour le lecteur et le spectateur.
En partant chronologiquement dans l’autre sens (le bon, pas l’autre ! Suivez, que diable !) on ne peut que citer “La machine à explorer le temps” d’H.G. Wells (1895, bien que la dernière version fut de 1924) où le héros, contemporain de l’auteur, se propulse dans un futur (très) lointain en 802 701 (vous étiez prévenus, c’est très loin et à une date étonnamment précise). Là, il découvrira ce qu’il reste d’une humanité divisée en deux entre les Morlocks (créatures cannibales vivant sous terre et devenues photophobes) et leurs repas, les Eloïs, un tantinet simplets, mais somme toute attachants (non, pas au fond de la casserole !).
Steampunk ou science-fiction ?
Les deux mon capitaine !
En effet, ces thèmes peuvent être considérés comme de la Science Fiction. D’une part parce que, la plupart du temps, c’en était au moment de leur écriture et d’autre part car les thèmes abordés sont récurrents, ont été utilisés et le seront encore dans le domaine :
- Comment peut évoluer, sur une période donnée et généralement longue, une peuplade / race animale si elle est isolée du monde ?
- Quels seront l’avenir et le devenir de l’humanité dans un avenir lointain ? Les dystopies et uchronies sur le thème sont nombreuses.
- Suivant ce thème de la S.F. on citera également “Frankenstein ou le Prométhée moderne” de Mary Shelley qui pose l’éternelle question : et si l’homme devenait un dieu créateur (tout en soulevant également la question de la différence) ? Là encore thème récurrent qui se retrouve aussi dans la création d’I.A. (cf. “Her” de 2013 avec l’excellent Joaquin Phoenix explorant la question de l’amour entre humain et I.A.) ou d’androïdes / robots qui revendiquent une “humanité” (il y a pléthore d’exemples, mais la série suédoise Äkta människor - Real humans - entre 2012 et 2014 me semble le plus pertinent).
Comme nous le voyons, le thème steampunk est hautement adaptable et adapté.
Mais ne nous emballons pas, il se pourrait bien que quelques miscellanées sur la Science Fiction et le Fantastique naissent sous ma plume prolixe qui, d’ailleurs, me démange un peu la paume là où, normalement, se situe un poil. Mais je m’égare …
Et les non-humains dans le steampunk ?
Rebondissons (sans leur faire de mal) sur les créatures qui peuvent devenir, dans ce cadre, des espèces à part entière, totalement intégrées à l’univers (et non découvertes lors d’incroyables expéditions).
Je citerais comme exemple la superbe série “Carnival Row” (2019) où les humains côtoient (de plus ou moins loin et pas en totale harmonie) des créatures tels que les fées, les centaures ou les pucks (sortes de faunes) et ce dans un univers totalement steam. L’effet est saisissant.
Mais si les créatures n’étaient que des humains différents ? me demanderez-vous.
Et bien oui, c’est possible (comme le disait souvent mon homologue d’Arabie, Maîstre Hassan Céheff). Prenons, à nouveau, une série en référence : “The Nervers” (2021) où des femmes se sont vue dotées, suite à évènement particulier (ne spoilons personne), de pouvoirs façon superhéros Kirbyesques* dans un contexte très Victorien. On notera la présence d’un des personnages principaux : une inventrice, qui va tirer doucement la série du côté de la S.F. avec ses incroyables inventions (dont une superbe voiture électrique à trois roues … Quoique pas si SF que ça : rappelons qu’en 1900 aux USA plus d’un tiers des véhicules produits sont électriques … Contexte historique encore et toujours !).
Pour citer un thème récurrent, mais ô combien contemporain (et jouissif) de cette prolifique époque : les vampires. Nés notamment (il n’a pas été le premier, mais il marqua un virage dans le style) sous la plume de Bram Stoker avec “Dracula” (1897). Qu’est Dracula si ce n’est un homme perverti à l'extrême (mais qui saura trouver la rédemption) ? On notera qu'au-delà de la dimension horrifique, les thèmes abordés sont profonds et nombreux. Effleurant, entre autres, un thème de la psychanalyse cher à l’époque : Eros et Thanatos.
Qu’en est-il de la magie ? vous exclamerez-vous.
En effet, un œil non averti pourrait croire que ce qui précède puisse être de la magie, mais les futés que vous êtes sauront faire la différence. Magie et Steampunk sont néanmoins tout à fait miscibles. Prenons pour exemple la série animée issue du jeu League of Legends : “Arcane” (2021) où une technologie issue de la magie apporte de grands pouvoirs (impliquant de grandes responsabilités comme le dirait Benjamin Franklin Parker).
Il est également possible de trouver un joyeux mélange de tout ceci dans des romans hybrides abordant, entre autres, le mythe de Cthulhu, ses monstres hideux et baveux à souhait et son étrange magie …
Mais, comme dit plus haut : pas de spoil ! Votre serviteur ayant lui-même jeté quelques mots sur le sujet dans ses romans “1880 e pluribus unum” et “1881 Mobilis in mobile” (le second à paraître sous les auspices gracieux de mon vénéré et révéré grand maîstre copiste du très privé cercle Archancourt), je préfère vous laisser le plaisir ineffable de la découverte.
Ce sera tout pour cette ultime (ou pénultième ? Qui sait ?) épître des Miscellanées Steampunk de Maîstre Philippe. J’espère qu’en bon Maîstre j’aurais, grâce à cette exploration, semé la graine de la vocation, ou a minima de la passion pour cet univers si riche et varié qu’est le Steampunk
Maîstre Philippe
Le xx Martius MMXXII
*En référence à Jack Kirby (1917-1994) “père” de la plupart des superhéros des comics américains (Captain America, les 4 fantastiques, Hulk, Thor, …).